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Journal de mes pensées, janvier 2024


***

 

C’est un lieu commun de le dire: 

Plus on vieillit, plus le temps passe vite.

Arrivé un certain âge, atteint un certain âge,

Même quand le soleil ne veut pas se lever,

Même quand le temps est pluvieux et le ciel bouché,

Même quand on fait la grasse matinée,

Même quand on ne fait rien au lit,

Il n’y a vraiment rien qu’on puisse faire:

Le temps file, le temps passe vite.

Il ne veut pas ralentir.

S’embourber sous les draps.

Le temps ne veut pas que je le serre

Dans mes bras comme un gros bébé.

 

***

 

Je lis La Philosophie dans le boudoir.

C’est assurément un grand livre,

Un classique, ou du moins cela devrait l’être.

On sent bien que l’influence de La Rochefoucauld

Travaille en sous-main avec celle de Vauvenargues.

Amour-propre de l’un et docte cœur de l’autre.

On ne sait trop si Sade est un grand moraliste à rebours

Ou un grand immoraliste.

Ou les deux à la fois,

Donc un amoraliste comme la nature…  

Qui lui sert souvent (un peu trop facilement)

De preuve et de caution.

Il vise souvent juste dans tous les cas

Et aborde aussi des thèmes importants rarement soulevés:

Surcroît de beauté ajouté aux femmes par le vice.

Différents caractères, goûts et tempéraments des hommes

Obligeant à une forme de souplesse légale et sociale.

 

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Le rôle de l’homme, de l’homme d’élite,

Est de corriger la nature et l’homme.

Le prédateur et le carnassier.

Pour ce qui est de l’homme,

Cela inclut aussi et surtout

La nécessité de corriger

Le manipulateur et le trompeur,

L’imposteur et le tartuffe.

Petites gens qui sont aussi

Très souvent des prédateurs.

Des spoliateurs.

Petites gens qui pratiquent

Notamment à notre époque

Le harcèlement judiciaire.

Petites gens qui méritent de

Recevoir des fessées en public.

Il ne peut d’ailleurs,

S’agissant de la nature,  

Que corriger sa propre partie,

La partie inhumaine de la nature,

Si tant est qu’on puisse corriger l’homme 

Qui est par nature incorrigible lui aussi.

Mais, enfin, le véritable homme d’élite

Appartient lui aussi à l’espèce humaine, 

Faite avant tout, il est vrai,

Plus que les autres espèces animales,

De dissemblables.

Il peut donc essayer.

S’y faire ou s’y abîmer les dents.

Clairvoyant au pays des sourds,

Des borgnes et des aveugles.

Il est, si j’ose dire, la liqueur de l’humanité,

Pour reprendre un terme favori de Sade.

D’où son invisibilité et son impuissance  

Puisque la bibine coule à flot et fait rage…

Partout, sur les écrans, dans les ministères…

Dans les rues des villes comme dans les campagnes…

L’homme d’élite est très, très minoritaire,

Et son statut même lui sera contesté

Par des imbéciles lui usurpant ce titre.

Fiers d’appartenir à l’établissement

Et à la nomenklatura…

Mais ne sachant pas dans les faits

Ce qu’est un véritable homme d’élite.

Pour le reste, corriger la nature en acte,

Corriger les animaux carnassiers en acte,

Est impossible à moins de domestiquer 

Tous les animaux carnivores et sauvages.

Ce qui reviendrait à enfoncer un énième clou

Dans le cercueil de la nature.

Il faudrait pour cela les priver de leur liberté

Physique, physiquement 

Indissociable de leur milieu naturel.

Il faudrait pour cela les dénaturer.

Les prédateurs,

Propagateurs du laid

Dans le cas de l’homme,

Ne sont essentiellement

Corrigés qu’en pensée et en paroles.

Donc en rêve, virtuellement.

La raison et l’intelligence supérieure

Restent impuissantes devant la nature

Comme devant l’idiotie et l’arrogance humaines.

Idiotie et arrogance humaines

Qui ne veulent pas être remises à leur juste place    

Et qui n’ont que faire du beau, du vrai et du bien.

Du bon et du juste.

 

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La phrase la plus diabolique du livre de Sade,

La phrase la plus insoutenable du livre est bien sûr celle-ci:

Mais qu’ils ne dénigrent pas ce qu’ils ne peuvent entendre,

Et qu’ils se persuadent que ceux qui ne veulent établir leurs principes

En ces sortes de matières que sur les élans d’une âme vigoureuse

Et d’une imagination sans frein, comme nous le faisons, vous et moi,

Madame, seront toujours les seuls qui mériteront d’être écoutés,

Les seuls qui seront faits pour leur prescrire des lois

Et pour leur donner des leçons!

 

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Connaissance de l’homme (suite).  

Comment se fait-il que chez les hommes,

Les marionnettes se croyant des marionnettistes

Soient infiniment plus nombreuses que

Les marionnettistes se croyant des marionnettes?

Cas intéressant d’Emmanuel Macron.

Voilà une marionnette qui sait être une marionnette,

Mais qui se complaît à l’écran dans le rôle du marionnettiste.

Bref, des marionnettistes font jouer à cette marionnette

Le rôle du marionnettiste. Ce qui doit les amuser.

On peut dire aussi que Matignon est un petit théâtre

De marionnettes avec un marionnettiste marionnette

Opérant depuis l’Elysée.

Avouons que pour ce qui est de la complexité

Il y a quand même un léger progrès

Par rapport au gendarme et à Guignol.

 

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Sade aime évoquer l’orgueil de l’homme,

Qu’il ne faut point confondre, je pense,

Avec l’amour-propre (L’armure sale?)

De Monsieur le Duc de La Rochefoucauld.

L’amour-propre de l’homme est clairement

D’après La Rochefoucauld

Le grand marionnettiste de l’homme.

En cela un peu semblable à la femme.

L’amour-propre est à ce titre

Plus dangereux que l’orgueil,

L’orgueil faisant plutôt songer,

Lui, à un jeune chien fou inoffensif,

Incapable de manipulation. 

Il existe une grande différence entre un idiot

Qui se sait idiot, et un idiot qui ne se sait pas idiot.

Le premier en rabat normalement

Et raccroche son arrogance au vestiaire.

Ce qui constitue un progrès certain, assez net.

Potentiellement (potence, ciel, ment)

Une réelle avancée humaine et morale.

Voire sociale et politique.

Ce qui devrait donc normalement aider à soulager

Un peu l’amour-propre ou l’orgueil blessé de l’idiot.

 

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L’arrogance n’est jamais aussi belle

Que pendue dans l’ombre, noyée dans la foule,  

Soigneusement rangée autour d’un cintre.

 

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Comparées aux atrocités des abattoirs

Et aux tueries des chasseurs

Pervers, cruels et idiots,

Les perversions des personnages de Sade

Paraissent de véritables enfantillages.

L’innocence même.

 

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J’en suis immensément convaincu (con, vain, cul):

Les partouzards sont des innocents.

Il faut surtout entendre le mot innocent

Dans le sens péjoratif du terme.

 

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Sade ne s’est pas aventuré sur le terrain de Diogène.

Sade n’a pas poussé le vice jusqu’à imaginer

Des hommes se comportant comme des chiens

Et partouzant au grand jour dans les rues.

Tout se passe encore à l’abri des regards,

Dans des lieux isolés qui rappellent farouchement

Les cabanes et autres lieux secrets de l’enfance.

Une grande partouze sur la place de la Bastille.

Voilà un sujet de roman audacieux!

 

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Connaissance de l’homme (suite).

Pourquoi les hommes sociaux immoraux

Sont-ils infiniment plus nombreux

Que les hommes moraux asociaux? 

N’est-ce pas là le sujet central

Du Misanthrope de Molière?

Laissons ici l’amoralité de côté.

 

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Idée mineure d’ouvrage majeur.

Sur le modèle romain des lettres écrites par des héroïnes,

Ecrire des lettres à des célébrités de notre temps.

En faire un gros recueil, un épais volume.

Par exemple: envoyer à Gérard Depardieu une lettre

Où lui serait proposé avec tact et prudence (pince-sans-rire)

Le rôle de Dolmancé dans une adaptation grand écran

Du livre de Sade La Philosophie dans le boudoir.

Tant il est vrai que Sade fut peu adapté au cinéma… 

En tout cas, ces films, s’ils existent, sont peu diffusés…  

Comme si les adultes étaient des enfants… Tiens, tiens…

(Tiens, tiens au pays des suppositions rigolotes…)

On enverrait dans la foulée à Carole Bouquet

Une lettre lui proposant le rôle de Madame de Saint-Ange.

 

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Le plus étrange, ou le plus logique,

Quand on lit Sade, c’est qu’on ne bande pas.

On n’a pas affaire à des œuvres charnelles ou érotiques,

Mais bien à des ouvrages purement intellectuels.

L’esprit l’emporte haut la main sur les sens. 

Comme il le dit bien lui-même entre parenthèses,

La posture s’arrange, puis l’attitude se rompt…  

Il y a là en effet quelque chose de mécanique

Qui rappelle un peu les animaux machines

De l’autre zig dont j’ai oublié le nom.

 

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2024. Année du centenaire

Du premier manifeste du surréalisme.

Etrange que l’on doive aux surréalistes

La réhabilitation du Marquis de Sade.

On songe aussi en passant, en lisant Sade,

Au long et lent dérèglement des sens de Rimbaud.  

Avec Sade, on a plutôt affaire à un long dérèglement

Raisonné, mécanique et conscient de la morale,  

Orchestré par un esprit forcené et bien huilé

N’ayant que faire des prétentions

Et autres à peu près de l’inconscient.

 

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Fin de vie d’Alain Delon.

Il arrive souvent que le film de sa vie privée

Soit le plus mauvais film de la vie d’un acteur.

Brigitte Bardot s’en est vachement bien tirée.

Elle dont la pensée politique, qui est aussi la mienne,

N’est représentée par aucun parti politique,

Ce qui démontre bien le caractère profondément

Immature, puéril, grotesque, injuste et pervers

De la vie politique française contemporaine.

Mais aussi européenne, occidentale

Et mondiale dans son ensemble.

Car ce parti de la raison, de l’intelligence et du cœur,

Je ne le vois pas exister non plus à l’étranger.

 

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Philosophie régnant autour de la mangeoire aux oiseaux:  

Comme les températures sont relativement douces,

Je leur donne juste de quoi soutenir leurs moyens

Et leurs forces afin qu’ils puissent aisément aller quérir

Ailleurs, dans la nature, le complément nécessaire.

 

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Je lis des poèmes de Pierre Perrin, poète du pays de Courbet.

Des jours de pleine terre, visiblement un choix de poèmes

Censés être très autobiographiques et personnels.

Il est évident que Perrin n’est pas un grand poète

Et n’y connaît pas grand-chose en poésie

Puisque René Char serait "notre dernier grand poète".

Passons le côté grattant de l’éponge là-dessus.

Les poèmes politiques de Perrin sont nuls à chier.

Et sa pensée politique semble être celle d’un enfant.

Perrin n’est potable, respectable, lisible,

Que lorsqu’il écrit des poèmes consacrés à la pauvreté

Et à la rudesse de son enfance, ou des poèmes d’adolescent

Consacrés au désir charnel et sexuel

Que lui inspirent certaines femmes

Joliment décrites dans le feu de l’action.

Au moins n’écrit-il pas des poèmes qui veulent tout dire

Et ne rien dire, ce qui est une façon sûre d’éviter le pire:  

Le ridicule.

On trouve bien sûr, ici et là, quelques vraies réussites,

Quelques bonheurs d’expression, quelques vers et images 

Qui mériteraient de figurer dans d’autres poèmes,

Dans de vrais bons, voire dans de grands poèmes.

Petits bonheurs qu’un grand poète sera autorisé à piller

Et à recycler ailleurs à sa guise, mais avec discrétion!

Perrin raffole des paupières!

 

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Vaut-il mieux recevoir un coup de griffe

Dans un recueil de pensées qui passera à la postérité

Ou être louangé dans des articles et des fascicules

Que conchieront bientôt dans la joie les asticots?

 

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La plupart des hommes ne sortent jamais de l’enfance.

Ils se délestent seulement de sa meilleure part.

Ceux dont l’enfance n’a pas été heureuse,

Fut malheureuse, doivent se dire,

Doivent se persuader que l’enfance continue

Et que rien n’est perdu.

Une longue séance de rattrapage

Leur est offerte par l’âge dit adulte.

 

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Il ne serait pas étonnant

Que ceux qui arrivent à sortir

De l’enfance soient justement ceux

Qui ne se délestent pas de sa meilleure part.

Sans forcément la cultiver d’ailleurs.

 

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Il ne serait pas étonnant non plus

Que cette meilleure part de l’enfance

Puisse aider l’homme à sortir de l’idiotie,

Pas autant toutefois que la connaissance

Des douze vérités énoncées dans cet ouvrage,

Dans ce bienfaisant et indispensable ouvrage,

Dans ce journal et recueil de mes pensées.

 

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Qu’est-ce que la meilleure part de l’enfance?

Je ne suis pas un spécialiste de la chose. 

Sylvain Tesson a l’air d’être mieux renseigné

Que moi sur ce sujet. Il faut donc aller l’écouter.

Pour ma part, si j’en crois ma propre enfance,

Qui fut relativement heureuse,

En tout cas marquée par aucun traumatisme,

La meilleure part de l’enfance ou de l’enfant,

C’est sa capacité à savoir jouer tout seul sous une table, 

Sa capacité à construire des cabanes

Et des châteaux en Espagne avec trois fois rien,

Des lunes de trois-mâts avec quatre planches,

Et sa capacité à jouer des rôles,

Voire à jouer tous les rôles d’une seule

Et même aventure à plusieurs personnages,

Bref, une réelle capacité imaginative

Qui diminue grandement avec le temps.

Il semble que peu à peu, au fil des années,

La meilleure part de l’enfance s’évapore

Comme l’eau saumâtre des salines,

La belle eau rosée des marais salants.

Comme si elle était la part des anges

Et ne voulait plus côtoyer la part des démons.

Plus lourde et plus terrestre.

Il faut encore ajouter à cela ceci: 

Une fois évaporée cette meilleure part,

Il ne reste plus beaucoup ou plus du tout

De sel dans les bassins.

 

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Pour le reste, je ne crois pas qu’il y ait

De différence fondamentale entre l’enfance

Et l’âge dit adulte, ce qui explique en partie

Pourquoi les adultes restent des enfants.

 

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Par exemple, je ne crois pas que la crédulité

De l’enfant soit supérieure à celle de l’adulte.

Il s’opère juste avec l’âge un déplacement,  

Un glissement de celle-ci.

L’enfant tend surtout à croire aux fables,

L’adulte aux idées fausses et aux idées reçues.

Mais dans les deux cas, la propension à croire

Aux fables de sa propre invention reste forte.

La différence étant que les fables de l’enfance

Sont réellement liées à un monde imaginaire 

Où l’on peut jouer des rôles divers et variés

Et s’engager dans de vraies fictions vécues, 

Tandis que les fables de l’adulte sont plutôt

Inspirées par la vie réelle et par la réalité sociale. 

Donc marquées par un appauvrissement certain.

 

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Quelle différence entre un enfant qui croit au Père Noël

Et un adulte qui croit aux intox quotidiennes

Et aux assertions des journalistes parisiens?

Notamment dans le domaine politique

Et dans le domaine culturel,

Là où elles sont généralisées

Et monnaie courante.

Croire aux secondes est beaucoup plus

Dommageable pour la société

Et pour la vie sociale et publique.

La conséquence immédiate,

C’est l’obscurantisme de l’individu

Et de toute une partie de la population.

Le maintien dans l’ignorance,  

Dans le mensonge et dans la naïveté.

Une naïveté autrement plus profonde

Et dommageable que celle de l’enfance.

 

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On croit communément que l’amour et le sexe

Sont ce qui différentie l’enfance de l’âge adulte.

C’est faux.

L’amour et le sexe ne sont que la poursuite

Et la continuation des enfantillages. La preuve:

Je n’ai jamais été aussi entreprenant

En ces matières qu’à l’école maternelle.

Merci les porte-manteaux et les manteaux,

La cohue des enfants à la sortie des classes.

Les baisers volés dans le tourbillon des élèves!

Je n’avais pas l’air de la traumatiser.

 

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On pourrait d’ailleurs dire que l’amour

D’une personne du sexe opposé,

D’une personne appartenant à la même espèce,

Constitue la forme la plus élémentaire,

La plus pauvre et la plus intéressée de l’amour.

La forme somme toute la plus enfantine.

Il existe deux autres formes d’amour,  

Autrement plus larges et plus désintéressées.

Plus nobles et plus matures en somme. 

L’amour du prochain au sens large,

Au sens chrétien du terme. 

Et l’amour de la nature

Et de l’ensemble des créatures terrestres.

Je laisse ici de côté l’amour des objets,

L’amour des menus objets du quotidien

Auxquels on est habitué et avec lesquels

On a tissé des liens d’affection,

Par exemple son écharpe de laine,

Comme l’amour de l’art et des œuvres d’art. 

Je laisse aussi de côté l’amour

Tarte à la crème des mots.

Je m’intéresse ici à la nature et au cosmos, 

Et aux seules créatures vivantes et terrestres.

Eros évolue avant tout dans le cosmos.

Cupidon, avec son arc et ses flèches,

N’est qu’un galopin en comparaison.

Il n’est pas forcément aisé de concilier

Ces trois formes différentes d’amour.

De fondre ensemble ces trois vies amoureuses

Différentes en un tout cohérent et harmonieux.

Il se pourrait bien d'ailleurs que cela soit du sport.

Pour aimer réellement son prochain au sens chrétien

Du terme, tous ses prochains, il faut d’ailleurs

Soit être un saint, soit être un idiot.

Je ne crois pas que l’humanité ait beaucoup à gagner à

Aimer les prédateurs, les manipulateurs et les pervers.

Pour le poète sérieux, digne de ce nom,

L’amour du brin d’herbe restera toujours

Plus important que l’amour d’Elsa ou de Gala.

On peut parler poétiquement du brin d’herbe

Ou de l’étoile sans parler de Gala.

On ne pourra pas parler poétiquement de Gala

Sans parler du brin d’herbe ou de l’étoile.

D’ailleurs, s’agissant de cette première forme

D’amour, la plus communément admise,

Ce qui compte d’un point de vue poétique,

Ce n’est pas tant l’amour que le désir.

L’amour du poète est avant tout un amour

Global pour la nature et le cosmos.

Pour toutes les créatures terrestres.

 

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La neige amoureuse de la souche

La neige tient bon sur la base du tronc coupé

Soleil cou coupé, décollation de l’arbre

Le lierre enlace mieux le tronc que la neige

La neige fait voir les aisselles de l’arbre

La neige qui n’a pas fondu ne cesse de franchir

Le ruisseau sur les troncs d’arbres effondrés

 

Galets blancs impeccables, frottés énergiquement

Par le courant maniaque de propreté

Ne voulant rien céder à la lavandière!  

Lingère, que le linge erre à sa guise!

Galets roses de la berge caillouteuse

Se prenant pour les joues des nymphes

 

J’aurais aimé que ces jours de neige durent plus longtemps

Ils paraissent souvent aussi éphémères que la vie elle-même

 

Le rêve médiocre débouche sur la cécité

Le grand rêve sur la lucidité 

Le rêveur médiocre vit dans l’aveuglement

Le grand rêveur dans la lucidité extrême

Dans la clairvoyance ininterrompue

Mais tout cela est peut-être trop beau pour être vrai…

 

La vie du lutin au bord du ruisseau

Infiniment plus grande et plus merveilleuse

Que celle de l’homme au bord du fleuve…

Pauvreté du géant balourd…

Bras ballants au bord de l’océan…

 

Promenade:

Il ne s’agit pas de fatiguer le vieux chien.

Il s’agit seulement qu’il retrouve au retour,

Après l’effort mesuré,

Ses deux tapis avec grand plaisir.

Il convient même qu’il les anticipe avec joie

En pensée vers la toute fin de la promenade.  

 

 

Je ne sais pas si je dois cette modique récolte du jour,

Bien suffisante dans tous les cas, à la source, à la nature,  

Ou bien à la promenade avec le vieux chien.  

Merci aux trois!

 

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Traduction des poèmes.

(Je lis maintenant du Marlowe.)

Il peut arriver que la traduction d’un vers soit si heureuse

Qu’elle dépasse en qualité le vers de la langue d’origine.

Cela n’est pas dû en général au talent du traducteur,

Mais bien au hasard et aux circonstances…  

En fait au génie particulier,

Au vocabulaire et à la syntaxe de la langue de traduction

Plus habiles que ceux de la langue d’origine

Pour exprimer poétiquement

Une idée ou une image précise.   

 

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Victoire de Donald Trump dans l’Iowa.

Vivement qu’en novembre prochain  

Trump soit élu président des Etats-Unis

Pour la troisième fois consécutive…

 

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Le vote par correspondance, le vote électronique,

Le décompte des voix dans des lieux clos et fermés

Faisant partie de villes corrompues par des dizaines d’années

De népotisme, d’errance et de gouvernance du parti unique,

Toujours le parti démocrate en l’occurrence,

Le parti démocrate très mal nommé,

Autant de pratiques qui encouragent, facilitent

Et autorisent les manipulations et la fraude,

Non pas à grande échelle, ce serait trop voyant,  

Mais ciblées là où il faut pour faire pencher la balance  

Du côté démocrate, donc du mauvais côté.

Tous les experts honnêtes et candides

De la fin du vingtième siècle se sont accordés

Pour le dire: le vote par correspondance

Est l’ennemi numéro un de la démocratie.

Evidemment, en ce début de vingt-et-unième siècle,

Leurs avis et conseils ne sont plus audibles…

Ils sont cachés et balayés sous le tapis

Par les médias de masse du système…

Avant d’être religieux,

Le vingt-et-unième siècle est surtout frauduleux…

Que les Français ne se fassent aucune illusion:

Les régimes autoritaires sont rois…

Les fausses démocraties sont reines…

Reines est un bien grand mot…

Elles sont plutôt des princesses, 

Autant dire des danseuses.

 

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Un régime autoritaire

Qui défend l’intérêt national

Vaudra toujours mieux

Qu’une fausse démocratie

Qui ne le défend pas et qui organise

Sciemment l’invasion de son propre territoire

Par des populations étrangères et barbares,  

Hostiles à sa culture et à son mode de vie,

Hostiles à sa civilisation et à la couleur de peau

De la grande majorité de ses membres.

Couleur de peau qui n’a pas vocation à changer. 

 

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Inflation galopante.

Non seulement les prix ont augmenté,

Mais les paquets et les portions ont rétréci,

Et commencent à ressembler férocement 

Aux lieux chers de notre lointaine enfance.

Normal en un sens… puisqu’on est gouvernés

Par des demi-portions.

Le nombre de biscuits n’est d’ailleurs plus

Clairement indiqué en gros sur les paquets.

Il faut une loupe et un détective pour le trouver.

Mais de tout cela, bizarrement, personne ne parle.

Serait-ce un secret d’Etat classé défense?

 

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Connaissance de l’homme (suite)

Et très probablement des animaux.

Le temps s’accélère,

File plus vite à mesure qu’on vieillit,

Et certains lieux, certains espaces, rétrécissent.

Les créatures terrestres ne sont pas totalement

En phase avec l’expansion accélérée de l’univers. 

 

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Crise des agriculteurs.

Il est clair qu’en ce vingt-et-unième siècle

Cadenassé par le droit supranational,

Intéressé, corrompu et pervers,

Le droit national assujetti et glauque,

La propagande médiatique,

Le mensonge qui tourne en boucle

Comme le tube de l’été,

Les mensonges par omission

Façon poinçonneur des lilas,

L’incompétence, le népotisme, la fraude,

L’idiotie échevelée, l’impunité, l’indécence et le sans-gêne,

Il faudra en passer par 1789 (à tout le moins)

Pour changer les choses en profondeur.

Les manifestations pacifiques

Font le jeu du régime et du système.

 

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Nourrir les gens, c’est bien. 

Les nourrir sainement, c’est mieux.

Ne pas saccager la France,

Ne pas détruire ses paysages,

Aimer la nature, respecter la nature,

C’est encore mieux.

           C’est infiniment mieux.          

 

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De la même manière que seuls les grands poètes

Devraient être autorisés à remplir les cervelles des gens,

Seuls les bons paysans amoureux et respectueux de la nature

Devraient être autorisés à remplir leurs estomacs.

 

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Dividendes élevés des actionnaires.

Compression du personnel.

Politique des bas salaires.

Nécessité d’une nourriture à bas coût

Pour éviter la disette, la révolution.

Tout est lié, les amis, tout est lié,

Comme le petit bois mort

Dont on fait les fagots.

Football, rap, séries télé et polars

(Et autres Printemps des poètes…)

Pour détourner et abrutir les esprits.

Tout est minutieusement tordu,

Orchestré, planifié et réfléchi

Par les tenants du système.

Pervers et corrompus.

Tout.

 

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Tel chien, tel maître.

France, pays de roquets

Et de chiens méchants.

De maîtres mal dressés.

De nuisances quotidiennes.

 

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Mise au point fondamentale et indispensable.

La campagne n’appartient ni aux chasseurs,

Ni aux agriculteurs.

Les premiers devront d’ailleurs disparaître.

Elle appartient d’abord à la nature,

Aux rêveurs, aux promeneurs et aux poètes.

Comme toute chose précieuse en ce bas monde,

Elle appartient d’abord aux gens désintéressés.

Aux fidèles et aux purs.

 

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Quand je me promène sur les chemins,

Je ne suis pas précédé par ma renommée ou ma réputation.

Je suis précédé par la beauté et la gentillesse de mon chien.

Ambassadeur plus avenant que son maître.

Merveilleux froid de l’hiver qui donne au vieux chien

Un semblant très convainquant de seconde jeunesse.

Il reprend des couleurs dans la neige immaculée.

Il ne court pas partout, il ne trottine pas, mais il trotte bien.  

Il reprend sa place devant. Son poste d’éclaireur folâtre.

Il ne traîne pas derrière en tirant la langue et l’arrière-train.

Terribles chaleurs de l’été qui le forcent à se traîner,

Qui l’engluent derrière moi et qui cherchent à l’engloutir

Dans un lointain passé que je ne veux pas voir.

 

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On l’aura compris quand même:

Le chien qui trotte est moins gracieux

Que le chien qui gambade ou qui trottine.

 

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Vivre avec un chien et un chat, c’est largement suffisant

Pour être emporté par le fameux tourbillon de la vie

Auquel les hommes accordent en général trop d’importance.

Ce tourbillon n’étant en fait qu’un élément météorologique

Parmi d’autres du phénomène communément appelé la vie.

Tandis que les allers et venues du chat me donnent le tournis,

Font de moi un portier et un liftier de grand hôtel,

Les miennes, quand je m’affaire et fais du rangement,

Ou me transforme en lourdaude fée du logis,

Donnent le tournis à mon vieux chien couché sur le tapis.

Cette petite tornade remplace pour le moment

Dans la maison l’escalier à vis manquant…

 

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Mon petit doigt me dit que le bilan carbone

Des gens possédant une riche vie intérieure

Est meilleur que celui des pauvres gens

Fortunés (friqués) n’en possédant aucune.

Juste une intuition,

Mais mon petit doigt a souvent raison.

Beaucoup de gens qui croient posséder

Une vie intérieure n’en possède en fait aucune.

La vie intérieure n’est pour beaucoup

Qu’un spectre à défaut d’être un rêve.

 

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C’est quand je retravaille un poème

Que je me sens vraiment fée du logis.

Je fais le ménage, il n’y a pas d’autre mot.

Et ce à tous les étages du poème.

J’ouvre les fenêtres, j’aère les pièces.

J’époussette les meubles, je cire les parquets.

J’en viens même à douter de mon sexe.

 

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Parfois, ce que j’écris dans ce journal

De mes pensées se retrouve dans un poème

Exprimé en vers sous forme poétique.

Ceci par exemple: livres d’été et livres d’hiver.

Les petits caractères sont faits pour la belle saison.

L’hiver nécessite des ouvrages à grosse police.

Il en va donc des livres comme des plantes.

Ils interagissent avec la lumière du soleil.

Ils sont très sensibles à la luminosité.

Ils doivent s’adapter aux conditions du ciel.

On retrouve cette idée à la fin de la deuxième

Partie de mon poème L’Epervier de Diane,

Partie consacrée au thème de la chasse.

Ils, ce sont les vers du poème consacré à Diane.

 

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Ils ne craignent pas non plus les antres obscurs

Où vos consciences, la nuit, sombrent…

Le bruit des gouttelettes suintant des murs…

Ils savent d'où ils proviennent: la bouche d'ombre...

Ils sauront y animer vos veillées du soir

Et y prendre la mesure du déversoir…

Si veut bien y entrer un peu de clair de lune

Pour éclairer le visage et l’étonnement

De chacune.

Ils sauront luire d’eux-mêmes incidemment.

Un conseil cependant: les petits caractères

Sont faits pour la belle saison.

La lumière se croit alors destinataire

De tout poème caché sous les frondaisons.

Ne la choque point que le miel sorti des bouches

Des abeilles ne soit plus que pattes de mouche.

Pour ce qui est du long hiver

Moins généreux en lumière propice,

Choisis une édition à très grosse police.

Une édition qui ne rapetisse les vers.

Choisis une police faite pour l’enfance,

Une police d’assurance.

Dévorez-moi ces vers qui sont entre eux d’accord

Et rangez ce poème dans un coffret d’or.

 

***

 

J’y reviens au grand galop.

Je suis vraiment fasciné par la grande complicité

Qui unit la neige, le froid, le gel et mon vieux chien.

Il retrouve vraiment sur les chemins gelés un allant,

Un entrain, un second souffle, une seconde jeunesse.

Le bonhomme hiver est bon et doux avec les siens.

 

***

 

L’un des grands plaisirs du vers régulier,

L’une des grandes jouissances de la rime,

C’est réussir à écrire des vers où il semble vraiment

Que les mots qui riment ensemble ont été créés

Par la langue uniquement pour figurer dans ces vers.

Quand on y parvient (et un même couple de mots

Peut prendre place ainsi dans plusieurs poèmes,

Dans plusieurs vers de cet acabit),

C’est une grande victoire, un réel triomphe poétique.

On connaît le fameux duo arbre et marbre.

On pourrait citer aussi ce trio magique:

Dérisoire, illusoire et provisoire.

Mots dont on sent bien qu’ils appartiennent tous à la belle

Et grande et majestueuse famille du fragile et de l’éphémère.

Laissons ici de côté amusoire, collusoire et infusoire.

 

***

 

Choix du mot juste en poésie.

L’important, le primordial,

C’est la double pertinence du sens et du son.

La pertinence du double sens éventuel d’un mot

Ne constitue qu’un luxe secondaire.

L’important, c’est que le mot,

Grâce à cette double pertinence

Du sens et du son, ne jure

Ni dans le vers, ni dans le poème.

En fait, paradoxalement,

Il faut que le mot se fonde

Parfaitement dans le vers

Au point de devenir quasiment invisible

Comme Pluton se promenant sous son casque. 

Le tape-à-l’œil doit être rangé au vestiaire  

Comme l’arrogance, et cela vaut même,

Je dirais, pour la rime,

Qui est pourtant au vers et au son

Ce que le cul du ver luisant

Peut être au ver et à la lumière.

L’important, c’est de ne pas jurer,

De ne pas déparer.

Mais encore faut-il que naisse sous la plume

Quelque chose qui puisse être déparé!

 

***

 

Exemple d’un mot sciemment usé 

Pour son double sens dans un vers.

Ici, le verbe « combler »,

Un verbe qui se prête assez aisément à cet exercice,

D’autant plus que nous parlons ici des nymphes.

 

Alors elles surgissent!

Elles jaillissent en renfort!

Elles comblent les interstices!

Elles déguerpissent dehors!

 

***

 

Impressionnant le nombre de mots

Du dictionnaire qui sont inutiles pour la poésie!

Allez, jetons-les tous à la poubelle

Puisqu’ils ne servent à rien!

 

***

 

En poésie,

Magistrale superfluité des mots savants.

Danger posé par la connaissance scientifique. 

Par la tentation scientifique.

Les doctes Muses aiment le vocabulaire courant.

Un vocabulaire universel.

 

***

 

J’ai déjà évoqué la pauvreté et le mauvais goût

Du vocabulaire français dans un cas précis,

Celui du verbe « profiter » (et du profit qui va avec),

Lié au monde de l’argent, de la finance et de la rentabilité.

L’injonction « Profite bien » constitue d’ailleurs l’une

Des plus misérables et sinistres injonctions de notre époque.

Les alternatives sont peu nombreuses: on a « jouir »

Dont la forte connotation sexuelle est aussi malheureuse.

Bref, il manque un verbe de bon aloi désintéressé,

Détaché de toute connotation financière ou sexuelle.

Le verbe « goûter » n’a pas tout à fait le même sens.

On peut tout au plus saisir l’occasion,

Mais l’idée de jouissance, de plaisir ou de profit

N’est pas franchement incluse.

On trouve dans la même veine le verbe « intéresser »,

Lui aussi fortement lié au triste monde de la finance.

Mais dans ce cas précis, les choses sont moins dramatiques,

Les alternatives sont plus nombreuses.

Il reste néanmoins pour le moins regrettable

Que les deux verbes phares de notre langue 

Utilisés pour exprimer ces deux idées fondamentales

Nous viennent du monde de l’argent et de la finance. 

Ou y soient fortement ou directement associés.

 

***

 

Voltaire s’amusait à cela, je crois.

Il serait bon que redevienne une pratique courante

De la vie sociale le concours de distique ou de quatrain.

Il s’agirait de créer un distique ou un quatrain

En partant de deux mots qu’on serait obligé

De faire rimer dans le distique ou le quatrain.

Par exemple, au hasard: plaisancier et nuancier.

 

***

 

Regardez passer au large ce plaisancier

Etudiant dans sa cabine le nuancier

Des tempêtes qui l’épargnent depuis des lustres.

Il cherche celle qui le rendra plus illustre.

 

***

 

Je cabotine beaucoup.

J’ai la plaisance d’esprit de beaucoup cabotiner.

Le cabotinage de la pensée me fait penser à la gambade

Du chien gentil et civilisé, trottinant sur les chemins;

C’est pourquoi je la chéris, je l’affectionne tant.

La plaisance d’esprit et la présence d’esprit

Se confondent d’ailleurs fort aisément

Et sont faites l’une pour l’autre.

Cabotinage le long des côtes.

Agréablement vôtre!

 

***

 

On jette d’abord à l’eau ses pensées à grands traits,

Puis on doit ensuite s’expliquer, préciser sa pensée

Dans la cabine du capitaine.

L’expression de la pensée a deux grands ennemis:

Le malentendu fâcheux, évitable, regrettable, 

Et l’interprétation vicieuse, fallacieuse, ou erronée.

Il faut éviter les premiers,

Et ne pas prêter le flanc aux secondes.

C’est de la navigation serrée, au près.

Les écoutes doivent être bien tendues.

 

***

 

Le chien, tant qu’il est avec son maître, tout va bien.

En cela pareil au capitaine avec son navire.

La chose est plus vraie encore quand on a affaire

Au vieux chien et à un vieux loup de mer.

Quand le maître est un bon maître,

Le navire un bon rafiot.

 

***

 

Je ne participe pas au printemps des poètes.

Je participe seulement au long hiver des grands poètes,

Seule manifestation à ma mesure et digne de ma personne.  

Je participe aussi, ce faisant, mais ça, c’est top secret,

Aux longs manteaux de fourrure des nymphes enneigées.

Le printemps des poètes n’est qu’une grossière rustine  

Et la communication qui tourne vaguement autour

Un vulgaire ectoplasme.  

L’existence de l’ectoplasme est désormais

Médiatiquement démontrée.

 

***

 

Pétition contre Sylvain Tesson.

Comment des individus aussi naïfs et immatures

Politiquement, aussi bornés idéologiquement,

Peuvent-ils décemment croire être des poètes?

Comment de tels individus, de tels nabots,

Peuvent-ils croire être assez intelligents

Pour écrire? Pour être des poètes?

Comment peuvent-ils avoir le culot

De publier et de trouver des éditeurs?

Je sais bien que dans la même veine

On a eu par le passé Aragon,

L’aveuglé d’Elsa et de Moscou

Qui ne comprenait rien à la politique,

Mais tout de même,

Cela n’explique pas tout.

 

***

 

En hiver, la truite défraye la chronique

Dans les petits ruisseaux transversaux.

De Gaulle parlait de sa traversée du désert.

Désert de verdure et d’eau fraîche

Où l’on peut croiser Diane avec ses amies

Ou bien Apollon accordant tranquillement sa lyre

Assis sur une souche, à l’ombre d’un chêne. 

Le grand poète ne traverse pas le désert.

Il y vit au grand jour, il y respire l’air pur, 

Il l’habite comme le poumon même de l’univers.

Il y trouve et lui donne sa pleine mesure.

Il traverse seulement un long hiver qui débouche

Sur le printemps comme traverser le printemps

L’obligerait à déboucher sur l’automne.

Les foins dorés, cymbales de l’automne.

Dixit Mallarmé cité par Valéry.

Exit l’été!

 

***

 

Qu’on se le dise:

Le petit radeau du business de l’édition

Sera bientôt avalé par la grande vague de l’Histoire. 

Petits écrivains s’enorgueillissant d’être publiés… 

Que la grande faucheuse passe et soit sans pitié avec eux.

De même que la réalité médiatique et sociale

N’est pas la réalité, n’est que du théâtre,  

Et du mauvais théâtre en plus de cela

Où les rôles sont souvent mal distribués,

La réalité éditoriale parisienne n’est pas la réalité,

Heureusement, de la vie littéraire française.

 

***

 

Ce culte intéressé, débile et puéril du monde de l’édition

Commence d’ailleurs à me fatiguer très, très sérieusement.

Pour ma part, j’ai toujours considéré

Comme une faiblesse d’esprit rédhibitoire

Tout désir d’appartenance à un groupe,

Une coterie, une association ou un réseau.

Seuls Arthur Rimbaud et Soliman le Magnifique

Sont dans le vrai. Ainsi que La Fontaine.

 

***

 

Quand des gens me regardent en face en essayant

De me faire comprendre que les fables de La Fontaine

Sont faites pour les enfants,

Je vois bien dans leurs yeux

Qu’elles sont d’abord faites pour eux.

 

***

 

Vous n’avez pas connu la cinquantaine d’Arthur Rimbaud.

Vous connaîtrez à la place celle de Patrice Barberet.

Celle de Rimbaud ou la mienne,

Cela revient grosso modo au même,

Sauf que je suis plutôt (dans les faits) l’héritier

De Charles d’Orléans et de Jean de La Fontaine!

Et toujours actif! Veinards!

 

***

 

De Gaulle parlait de L’Immonde

Quand il évoquait ce torchon qu’est le journal Le Monde.  

Rimbaud disait que Paris était une blague immonde,

Ce que Tesson (j’en mettrais ma main à couper)

S’est bien gardé de révéler aux auditeurs de France Inter.  

Quand on parle de signataires provenant du monde de la culture,

On fait allusion en fait à un tas d’immondices

Et au monde de la sous-culture et du spectacle.

Au monde des confettis et des paillettes.

 

***

 

La grâce, c’est aussi et surtout la classe.

La grande classe. La très, très grande classe!

Mais attention, les vers où l’on parle de la grâce

Ne sont pas forcément les plus gracieux.

 

***

 

Sylvain Tesson, prince des poètes? Certainement pas.

Le Figaro prend ses désirs pour des réalités.

Les petits gars du Figaro prennent leurs désirs…

Poète des trognes cabossées et cassées, peut-être,

Poète des interstices, à la rigueur, je veux bien.

Mais surtout bon prosateur avant tout

Pour ce que j’ai pu en voir, daigné en voir.  

Donc pas tout à fait condamné à mort, mais

Condamné tout de même, hélas pour lui,

Aux seules fulgurances poétiques.

Eparpillées ici et là à la bonne franquette.

Comme d’autres avant lui: Jaccottet par exemple.

Jaccottet qui ne savait pas écrire des poèmes

Et dont la prose même était trop analytique

Pour pouvoir être de la vraie poésie.

Cas également de la prose épaisse,

Riche et colorée de Marcel Proust.

Céline, lui, fut un vrai grand poète

Dans Le Voyage au bout de la nuit.

Merci la phrase courte imagée explosive!

 

***

 

On n’en sort pas du vers!

On ne sort jamais de l’asticot!

Perrin a bien raison de dire que la vie

N’est qu’une éclipse de mort.

Et la Terre, elle, ne fait jamais

Qu’une ellipse autour du soleil.

Il n’y a pas de mal à vouloir

Rester dans la lune.

 

***

 

Les plus fins d’entre vous l’auront compris:

Je ne suis pas le prince, ni la princesse des poètes.

Je ne suis pas même le roi des poètes.

Je suis le sultan des poètes.

Un peu comme l’était Byron, je crois.

Dommage que Delacroix ne soit plus là

Pour peindre mon portrait en homme oriental.

 

***

 

Le Figaro devrait cesser de passer son temps à

Recueillir religieusement dans un flacon

Tous les pets et propos de Sylvain Tesson.

Quand bien même Tesson a souvent raison.

C’est vrai, contrairement à ses ennemis,

Il ne pète pas de travers… Mais quand même…

Le copinage et l’indécence ont des limites…

 

***

 

J’ai souvent raison moi aussi.

Je dirai les neuf dixièmes du temps.

Proportion logique pour un ovni,

Un véritable nourrisson des Muses.

Je n’ai pas grand mérite à cela:

Je suis un vrai aventurier…  

Je débroussaille à la machette…

Je traverse tous les fourrés…

Je vais au bout de ma pensée…  

Je n’hésite pas à tirer par écrit pour le public    

Toutes les conclusions qui s’imposent,

Celles qui peuvent l’aider à sortir de l’idiotie

Consubstantielle à l’espèce humaine.

Je ne tourne pas autour du pot

Comme le géant autour du volcan!  

Le géant qui craint de passer pour un bébé

Si jamais il s’assied dessus!  

Je défèque allègrement avec précision

Là où il faut et sur qui de droit.

Cela fait d’ailleurs partie de mes devoirs intangibles.

Je suis par ailleurs un vrai poète, un grand poète,

Un homme qui sait réellement écrire des poèmes,

Pas un écrivain voyageur qui fouille les interstices

Et les exploite à des fins littéraires prosaïques  

Comme d’autres fouillent et exploitent leurs bobos…

Leurs petits traumatismes d’enfance ou de genre.

 

***

 

Martine à la plage, Martine à l’école…

Sylvain sur un bateau, Sylvain en motoneige…

Sylvain en Grèce, Sylvain en Sibérie,

Sylvain avec les fées…

Sylvain chez Martine?

 

***

 

Raconter des histoires me barbe

Et la prose tend aussi à m’ennuyer.

Je n’y trouve pas mon compte en terme

De pure satisfaction esthétique et intellectuelle.

Raconter des histoires,

Je n’accepte de le faire que pour mes fables,

Car ce sont des fables écrites en vers, des poèmes,

Car ce sont des histoires courtes à portée sapientiale,  

Des historiettes qui se passent à la campagne,

Car les personnages sont divers et variés

Et, bien sûr, principalement des animaux.

J’ai eu la chance de ne subir aucun traumatisme

Dans mon enfance et dans mon adolescence.

Ce n’est qu’une fois adulte, une fois jeune homme,  

Que j’ai été confronté à des expériences perturbantes

Que je qualifierais de traumatisantes et marquantes.

Cela dit, je n’ai jamais éprouvé la tentation et le besoin  

D’explorer, et encore moins d’exploiter, littérairement

Ces moments sombres de ma vie. Bien au contraire.

Je me refuse catégoriquement à leur accorder une quelconque

Importance, pertinence, valeur, ou réalité littéraire.

Je ne veux plus en entendre parler

Car ils ne parlent déjà que trop en moi.

Le projet romanesque par moi conçu

Aux alentours de ma trentaine,

Fignolé aux alentours de ma quarantaine,

Et jamais réellement mis à exécution

Car supplanté par la poésie et les fables,

Concentre tous ses feux sur ce que je considère

Etre la période la plus belle et envoutante de ma jeunesse,

Mais aussi, assurément, la plus poétique.

D’ailleurs, le tome 4 de mon premier recueil de fables

(Sur la correction et l’achèvement duquel je vais bientôt me pencher),  

Ainsi que les deux recueils suivants projetés,

Situent l’action de la plupart des fables

Dans le même secteur géographique

Que couvre (et recouvre et redécouvrirait)

Cette œuvre romanesque

Vaguement ébauchée et surtout fantôme.

J’ai déjà évoqué dans ce journal et dans le détail

Ce projet d’œuvre romanesque divisée en huit courts romans.

Il n’est donc pas besoin ici que je m’étende là-dessus de nouveau.

Comme je l’ai déjà dit aussi, mon projet poético-littéraire

Mêlant proses diverses et poèmes, et s’inspirant de la manière

De faire de Larbaud, jouira de toutes les façons de la préséance

Par rapport à ce projet romanesque de longue haleine

Que je n’aurai peut-être jamais le temps de mener à bien.

Hélas.

 

***

 

Bref, on l’aura compris:

Je n’ai pas besoin de courir après les fées

Ou de tourner des couteaux dans les plaies

Pour trouver matière à écrire…

Je suis doté d’une réelle puissance créative

Qui puise autant à la source de la fable ancienne

Qu’à la source de mon vécu aimable et radieux.

 

***

 

Cela dit, c’est vrai, je cours après Diane et les nymphes

Dans mon poème L’Epervier de Diane.

Je veux bien en convenir.

Et je ne suis pas près de m’arrêter puisque la version

Longue de ce poème comptera environ 100 000 mots

Et m’obligera ensuite à courir après Artémis.

Je ferai une pause entre les deux déesses

En compagnie d’Apollon et d’Hyacinthe à Sparte.  

Ce sera mon Adonis à moi.

Tout ça, c’est ce qui est prévu.

La version courte de L’Epervier de Diane

Qui sera incluse dans le Tome 3 de mes fables

Compte actuellement 50 000 mots.

Je dois la relire encore une fois.

 

***

 

De même que le héros Hercule

Dut choisir un jour entre le vice et la vertu,

J’ai dû choisir entre les vers et la prose,

Entre la poésie et le roman.

Et aujourd’hui encore, maintenant que le choix

Principal a été effectué il y a quelques années,

Je demeure souvent contraint de choisir,  

De choisir entre les fables et les poèmes,

Mais aussi entre les poèmes et les poèmes.  

Car je porte plusieurs recueils de poèmes en moi

Comme je porte plusieurs recueils de fables.

Certaines grossesses doivent être ralenties et retardées.

Il n’est pas donné à tout le monde de travailler

Aussi vite que Victor Hugo ou Louis Aragon

Qui étaient probablement mieux organisés que moi.

Je ne suis pas certain d’ailleurs qu’il soit très intéressant

Et humainement souhaitable de travailler aussi vite qu’eux.

Pour tout dire, les gens qui pondent à la chaîne me laissent

Assez froid (sinon de marbre!) et ne constituent pas 

Des modèles pour moi. 

J’ai choisi la poésie et les fables car

Il me semble que la prose et le roman demeurent

Des pratiques littéraires un peu vaines

Et dérisoires comparées à la poésie.

Je trouve de manière générale le roman   

Trop centré sur les affaires humaines.

L’homme s’y regarde trop le nombril.

Il me serait impossible d’écrire un roman

Dont l’univers et la prose

Ne seraient pas franchement poétiques. 

 

***

 

Ne pas confondre poème en prose et prose poétique.

Les Illuminations, ce sont des poèmes en prose.

Les Petits poèmes de Paris, c’est de la prose poétique.

Il n’est pas interdit d’aimer et de pratiquer les deux.

 

***

 

Il n’y a de véritable poète que le grand poète

Qui sait écrire des poèmes.  

Des bons poèmes.

Des bons recueils de courts poèmes.

Voire, miracle, d’excellents longs poèmes

De la trempe de L’Odyssée, de L’Enéide  

Ou du Voyage au bout de la nuit.

Je m’en voudrais ici de ne pas citer

Aussi Dante et sa Divine Comédie.

Cervantès et son Don Quichotte.

 

***

 

Il reste donc à Sylvain Tesson

Encore une marche à franchir.

La plus difficile. La plus ardue.

La plus glissante. La plus décisive aussi.

La plus merveilleuse et la plus austère.

La plus haute marche à gravir. 

Celle réservée à une minuscule élite.

Une élite infinitésimalement petite, peu adepte

Des néons blafards, des lumières trompeuses, 

Des spots publicitaires des studios parisiens.  

Sylvain a encore un long chemin à parcourir…

Une haute marche à gravir…

Il va falloir passer par des chemins roses et bleus…

Des sentiers rocailleux violets, rouges et jaunes…

Mais peut-être que sa caverne parisienne

Regorge de cagibis, de trappes, d’angles morts,

D’échelles meunières, de tiroirs, de manuscrits,

De poèmes et de surprises du sous-chef! 

Sait-on jamais!

 

***

 

Printemps des poètes.

Tesson ne s’honore pas à présider

Ce genre de mascarade. Pantalonnade.

Il ne reste plus qu’à attendre et à voir

Si Tesson va s’accrocher à ce ridicule et misérable

Poste de président du printemps des poètes.

Est-ce bien rémunéré? L’histoire ne le dit pas.

 

***

 

Les polémiques sont comme les passions.

Une polémique chasse toujours l’autre… 

Et les polémiques, cela peut rapporter gros…  

Elles font vendre à défaut de franchement détendre…

C’est pourquoi elles défilent comme les modes.

Comme des bataillons de petits soldats de plomb.

Dommage que les mauvais hommes politiques,

Incompétents, nuisibles, pervers et nauséabonds,

Etrangers à l’intérêt national, puant sur les écrans,

Corrompus jusqu’à l’os et pourris jusqu’à la moelle,

Soient plus difficiles à chasser du pouvoir.

 

***

 

Il est quand même dommage que la pensée politique

Naturelle, à peu près mature et vertueuse de notre temps,

Soit défendue sur les plateaux télé par des Tesson, des fils à papa.

J’ai longtemps vécu à la frontière du Tarn-et-Garonne,

Pays de l’aventure douce, limitrophe de la cocagne.

Je veux bien pardonner aux aventuriers d’eau douce

Bien entourés, bien cernés et circonscrits par les caméras.  

Je pardonne beaucoup moins aux fils à papa surmédiatisés,

Bouffant à tous les râteliers (ou presque) d’un système médiatique

Que leur pensée politique devrait obliger à dénoncer.

Ce que Tesson se garde bien de faire afin de ne pas disparaître

Des journaux, des écrans télé, donc des écrans radars,

Donc des cervelles et des mémoires

Grégaires invitées à se ruer en librairie…

Pour financer la prochaine petite expédition…

Il y a là une réelle faillite intellectuelle,

Politique et morale de Sylvain Tesson.

Grand consommateur d’apparitions médiatiques,

De surexposition médiatique porteuse et vendeuse…

Tesson sait être et rester un garçon dans le vent,

D’où son grand amour de la voile, je présume.

Tout ce que j’écris là n’enlève rien à la qualité de ses livres

Et à la sympathie que peut inspirer le bonhomme.

Pour ma part, je préfère le rhum vieux à la vodka…

Je garde les patates pour les omelettes au comté.

La banane pour le banana split.

 

***

 

Il y a les ateliers poétiques et les râteliers médiatiques.

Tesson fréquente surtout les seconds.

Les bateleurs y sont plus nombreux que les bateliers.

 

***

 

Mon pauvre Sylvain, on n’est pas sortis de l’auberge.

Le soutien d’un conscrit et d’un grand poète se paie cash.

Il attente à l’amour-propre plutôt qu’au portefeuille,

Ce qui est une vertu tout bien considéré

Quand on a la chance de posséder une âme forte.

 

***

 

Rectification.

Tesson ne sera pas président du printemps des poètes.

Il n’en sera pas reine non plus.

Il sera juste parrain, comme Don Corleone.

Tonton quoi! Comme François Mitterrand,

Le célèbre curé d’un enterrement à Ornans.

 

***

 

Baudelaire appelé à la rescousse de Tesson

Dans les colonnes (les tambours) du Figaro.

Normal, Baudelaire, comme Tesson,

Etait prosateur bien plus qu’il n’était poète.

Baudelaire, il serait temps que les Français le sachent,

N’a pas écrit plus de trente bons poèmes dans sa vie.

Hasard heureux, chose remarquable et étrange,

C’est aussi le nombre de poèmes écrits par Edgar Poe!

Ceux qui veulent connaître la liste de ces poèmes

Et ne pas mourir idiot, peuvent me contacter.

Je rendrai publique un jour cette liste.

Pas de problème.

 

***

 

Tesson soutenu par Le Maire, Bertrand et Dati.

Que vaut-il mieux?

Mourir ou vivre avec de tels soutiens?

(Je n’ose pas écrire jouir de tels soutiens.)

 

***

 

Mourir.

Ce qui est difficile,

Ce n’est pas quitter la société,

Les hommes, les nabots, les idiots,

La lecture pathétique du Monde ou du Figaro,

Les colonnes du Point ou du Figaro,

Le tourbillon de la vie,

Le petit tas de feuilles mortes

Soulevé par le vent distrait des jours.

Pour toute intelligence bien faite et bien née,

Réelle et supérieure, tout ça,

C’est un véritable jeu d’enfant.

Et même une franche rigolade.

Une partie de plaisir.

Voire même une partouze

Plutôt qu’une parturition.  

Non, ce qui est difficile,

C’est quitter la lumière du soleil

Et l’eau claire et fraîche de la source.

Et ça, les poètes grecs l’ont bien vu.

 

***

 

L’éternité, c’est la mer allée avec le soleil.

L’instant présent, c’est le soleil buvant à la source.

 

***

 

Ce qui compte, ce n’est pas tant l’espèce

Humaine que l’épaisseur humaine.

 

***

 

Humanisme.

Marionnette, gendarme, guignol,

Idiot, nabot, partouzard, innocent,

Acteur, bébé, poète, prosateur, président,

Reine, parrain, tonton, aventurier, bateleur, batelier. 

Consommateur! Danseuse!

Les Humanistes de la Renaissance avaient raison:

L’homme peut être mille et une choses.

Il peut être mille et une choses

Tout en restant un enfant.

 

***

 

Consommateur! Danseuse! Lourdaud!

Nous tenons les trois Grâces de notre temps!

 

***

 

Quand je caresse et tripote le bas ventre de mon chien

Avec mes doigts, il me semble jouer du piano.

L’impression est encore plus franche et plus nette

Quand j’écoute le concerto pour piano de Dvorak.

Vivement que je déménage à Venise ou à Prague.

 

***

 

L’hiver se poursuit.

Il a neigé ce soir sur mon tricot

Des miettes de baguette décongelée.

 

***

 

On sait que chaque matin,

Je remonte la combe avec mon chien

Jusqu’aux deux arbres morts, écorcés vifs,

Mais toujours debout, élégants à souhait,  

Qui se dressent en lisière du bois.

Dix mètres plus haut ont poussé

Huit belles taupinières.

Avec en dessous, je présume,

Dans un long réseau de galeries,

Une belle taupe enrobée de velours

Qui, pareille à Mercure et à Ulysse,

Pareille à Orphée et à Hercule,

Peut se promener librement dans les enfers.

Le fameux royaume des taupes.

La veinarde!

 

***

 

Le chien flaire la taupe.

La bonne odeur de l’enfer.

Aussi puissante et enivrante

Que celle de la truffe.

 

***

 

Pourquoi certains médias de masse

S’acharnent-ils à vouloir que Sylvain Tesson

Soit un poète et le Printemps des poètes

Une manifestation populaire?

Si les participants du Printemps des poètes

Font indéniablement partie du peuple, 

Tout comme les nabots qui gouvernent

La France depuis quarante ans

Et les journalistes parisiens,

Le peuple, lui, en revanche,

Dans son ensemble, a d’autres soucis

Et n’a que faire du Printemps des poètes.

La postérité n’aura d’ailleurs

Que faire de toutes ces broutilles.

 

***

 

Sylvain, fais gaffe,

Il y a de la concurrence (con, cul, rance).

Le journal Libération essaie de promouvoir une poétesse.

Comme tu le sais ou ne le sais pas, la France de ce début

De deuxième millénaire regorge de Sappho en herbe.

De midinettes qui ne veulent pas faire du cinéma.

Le journal Libération en a plein dans sa musette.

Celle-ci s’appelle, tiens-toi bien, Rim Battal.

Elle est nue comme un vers (dixit Libé)

Et elle explore la maternité et la pornographie.

Elle est l’une des voix phares de sa génération

(Ne ris pas bêtement comme un gros réactionnaire).

Elle tient absolument à débiter ses âneries

Au Printemps des poètes que tu vas parrainer

Avec tendresse et amour en mars prochain,

Le mois du dieu de la guéguerre.

Attends-toi au pire ou au rire!

Bonne chance à toi, Sylvain!

 

***

 

Après le soleil,

Quoi de plus rayonnant sur terre

Qu’un poète maudit souriant,

Heureux et joyeux de l’être,

N’écrivant que pour lui-même et les dieux?

 

***

 

Certains disent: le Printemps des poètes

N’a pas besoin de parrain.

Moi, je dis: la poésie n’a pas besoin

Du Printemps des poètes

Et des petits poètes de troisième

Et quatrième ordre (je suis gentil)

Qui participent à ce succédané d’événement.

La France et le monde non plus.

 

***

 

Allez, c’est bon, j’en reste là pour janvier 2024.

L’essentiel a été dit, et comme a dit un jour le grand poète:

Il n’y a guère que l’essentiel pour tenir en respect l’infini.

Soit l’amour, la mort et la poésie.

Pour ce qui est de l’infinie bêtise humaine,

On pourra légitimement en douter.

 

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