Il est de tradition de dédicacer son recueil de fables à un souverain ou à un dauphin et, parfois, à l'intérieur même du recueil, certaines pièces à des individus ou à des personnages particuliers. C'est ce que firent généreusement Phèdre et La Fontaine.
L'avènement d'un système politique républicain (ou supposé tel) n'entrave en rien la légitimité et l'intérêt d'une telle pratique. Cependant, afin de conférer longévité, universalisme, pertinence et poésie à ma dédicace générale, j'ai décidé de dédicacer l'ensemble de mes fables aux fascinants et valeureux Papillons monarques américains, en espérant qu'ils ne disparaîtront pas un jour de la surface de la terre.
Je suis bellifontain tout partout sur la terre.
Je connais l’importance des préliminaires.
Il en va ainsi des fables et de l'amour:
L'acte doit être précédé de beaux discours.
Chers monarques,
Chers papillons de bon aloi,
La nuit des temps est un hiérarque
Et le gouffre d’effondrement l’unique loi.
Sur le pont de mon humble barque,
Embarquez, faites le bon choix!
Avec Hipparque et Aristarque,
N’ayons plus à toucher du bois!
Divines progénitures de Mnémosyne,
Je sais que vous allez par neuf.
Avec vous, aux alentours de Lizine,
Je suis la cigale, le rossignol, le bœuf!
Heureux que grâce à nos vieilles combines
L’humanité puisse s’étancher à du neuf.
Rassure le fait que vous soyez en cabine
Pour alléger la carène de mon ravin.
Il est un affluent que nos chants rembobinent
Quand nous voulons être taquins!
Ô Muses mortelles, je ne sais votre nombre,
Je ne sais combien vous êtes réellement;
Il en surgit toujours de nouvelles de l’ombre,
Le règne d’une seule est un vrai châtiment.
Dans une gorge que le ciel ne désencombre,
Je jouis des aumônes du ruisseau d'Amondans!
Sous la petite chute monacale
Surplombant le bassin bleu s'écoulant
Au cœur de la gouille dominicale,
J'installe mon chevalet placide et fringant.
Je le calme et je l'excite en posant la toile!
à suivre...